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Association québécoise des parents d'enfants handicapés visuels
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Les déficiences visuelles : Les effets sur le développement
Madeline Baillargeon, Publications du Québec, 1986

Les déficiences visuelles : Effets sur le développement

 

Développement moteur

 

Le développement moteur, ou de l’habileté à se mouvoir, dépend en partie de la curiosité de l’enfant à atteindre les objets ou les personnes qu’il voit.  L’enfant ayant une déficience visuelle à donc souvent une motivation moindre à se déplacer pour explorer son environnement.  Certains mouvements sont également appris par imitation : l’enfant tente de répéter ce qu’il voit faire par les autres.  Là encore, la vision réduite peut avoir une influence négative.  C’est aussi la vision qui permet de coordonner  les mouvements et de les ajuster à l’environnement.  L’enfant qui ne voit pas bien doit apprendre à utiliser ses autres sens et, s’il y a lieu, à interpréter une information visuelle limitée pour apprendre à se mouvoir en sécurité.  Tous ces facteurs contribuent assez souvent à un développement de la motricité globale quelque peu ralenti.

 

En ce qui concerne la motricité fine, qui a certains liens avec la motricité globale, le type et le degré des déficiences sont des facteurs importants dans son développement.  La distance séparant l’œil de la main étant courte, souvent l’enfant qui a un résidu visuel peut s’en servir suffisamment pour développer ses habiletés de motricité fine de façon adéquate.  Mais l’effort exigé alors est susceptible d’être supérieur à celui que doivent fournir les autres enfants.

 

Les enfants ayant une déficience visuelle ont parfois certains comportements moteurs particuliers.  Par exemple, ils se déplacent lentement, précautionneusement et parfois avec raideur.  Ils courent avec retenue, à moins d’être accompagnés ou d’être rassurés sur l’espace disponible.  Certains manifestent assez souvent des comportements d’autostimulation typiques, appelés maniérismes.  Ils semblent compenser les stimulations moindres qu’ils reçoivent de leur environnement   en se stimulant eux-mêmes.  Par exemple, ils se frottent les yeux ou se mettent les doigts dans les yeux pour se donner des sensations lumineuses, ils se frottent, se grattent, se jouent dans les cheveux pour se donner des sensations  tactiles.  Certains se bercent, sautillent, balancent leur tête ou leurs jambes lorsqu’ils sont assis, recherchant  ainsi des sensations kinesthésiques (de mouvement).

 

Développement cognitif

 

Sur le plan cognitif, l’enfant ayant une déficience visuelle a le même potentiel que tout autre.  Cependant, comme pour son développement moteur, il doit apprendre à utiliser ses autres sens pour découvrir le monde qui l’entoure, il doit aussi être encouragé à se déplacer pour explorer et connaître cet environnement.  Ces facteurs expliquent un certain ralentissement dans le développement intellectuel, qui s’efface cependant peu à peu, à mesure que l’enfant acquiert son autonomie.

 

Chez l’enfant fonctionnellement aveugle, la principale difficulté cognitive réside dans la formation de l’imagerie mentale.  La vision joue un rôle capital, l’absence importante de vision entraîne des difficultés dans le développement de certains concepts et dans leur mémorisation.  Par exemple, la vision d’un gratte-ciel facilite beaucoup la compréhension de ce que mot signifie.  L’imagerie mentale que l’on s’en fait après avoir vu des gratte-ciel s’associe au mot et en facilite la mémorisation.  Il faudra mettre à contribution le toucher, dans un tel exemple, et par comparaison entre une maquette ou des jouets (maisons et édifices miniatures) et l’expérience que l’enfant peut avoir d’une maison et de sa hauteur perçue dans ses déplacements, il pourra en arriver à déduire le concept de gratte-ciel.  Il aura eu besoin de plusieurs informations morcelées plutôt que d’associer beaucoup plus immédiatement la vision d’un tel édifice avec son symbole verbal, comme le font les enfants voyants.  L’enfant fonctionnellement voyant se développera donc de la même façon que ces derniers, mais prendra seulement plus de temps à le faire.

 

Développement du langage

Le langage est la grande force de l’enfant ayant une déficience visuelle.  L’utilisation très grande et, avec la pratique, souvent très raffinée qu’il fait de son audition favorise le développement et l’usage du langage.  Les gens peu familiers avec des personnes qui présentent une insuffisance visuelle sont souvent frappés par cette importance du langage chez elles.  Cependant, surtout chez les jeunes enfants, cette abondance du langage masque parfois l’utilisation des mots incompris.  L’enfant a alors tendance à répéter des mots entendus dont il ne possède que partiellement le sens ou même pas du tout.  Au delà de cette difficulté cognitive qui affecte le vocabulaire par ailleurs abondant, le développement est normal ou rapide sur le plan des structures de phrases et de la prononciation.  Par contre, les gestes, mimiques ou expressions faciales qui accompagnent le langage étant appris auprès des jeunes enfants lorsqu’ils les voient chez les autres, ils peuvent être absents chez les enfants qui ont une vision faible ou nulle.

Développement social

La maîtrise du langage rend habituellement très sociables les enfants ayant une déficience de la vue et facilite grandement leur développement social.  Ils ont plaisir à converser avec les autres enfants et avec l’adulte, et souvent même préfèrent ce types d’activités à celles ou ils manipulent des jouets.  Curieux, ils posent de nombreuses questions sur les gens qui les entourent et cherchent également à les connaître en utilisant leurs autres sens :  toucher, odorat, ouïe.  Cependant, les expérience antérieures et les attitudes de l’entourage ont un rôle primordial dans tous les aspects du développement de l’enfant ayant une déficience visuelle et tout particulièrement dans l’aspect social.  La surveillance étroite nécessitée par le problème de mobilité et de sécurité physique exige la présence presque constante d’adultes ce qui favorise ;es contacts avec ceux-ci.  Cette protection nécessaire risque fort de se transformer en surprotection et souvent priver ainsi le jeune enfant de contacts avec d’autres de son âge.  À l’âge préscolaire, il est donc fréquent de rencontrer des enfants ayant une déficience visuelle, beaucoup plus à l’aise avec des adultes qu’avec des enfants et peu enclins au partage avec leurs pairs.

 

Une déficience sévère nuit aussi à la participation de certains jeux collectifs.  Par exemple, l’enfant ne comprend pas quand un copain lui demande d’aller chercher le camion « là-bas ».   Les attitudes et l’intervention de l’adulte qui expliquera aux autres enfants la raison de certains comportements de l’enfants ayant une déficience visuelle sont très importantes.  En dépendent souvent l’acceptation de l’enfant par le groupe et sa participation au groupe.

 


Développement affectif

Le développement affectif de l’enfant dépend largement de son développement dans toutes les autres sphères.  Son autonomie influence beaucoup sa confiance en lui et sa capacité sociale à son tour améliore sa perception de lui-même.  Ici, comme ailleurs, les attitudes des autres à son égard sont également importantes.



[BAILLARGEON, Madeleine. « Entrez dans la ronde. L’intégration des enfants handicapés dans les services de garde. » Publication du Québec, 1986, 139 pages. Les déficiences visuelles : Effets sur le développement (p.75-77)